lundi 28 juin 2010

Parution du volume 7 des Fragments du Blog de t@d


Ce septième volume des Fragments du Blog de t@d, regroupe les principales contributions qui sont parues sur le blog de décembre 2009 à juin 2010.

Ces sept derniers mois, nous avons accueilli les textes d'une petite dizaine d'auteurs différents. Parmi eux, des praticiens mais aussi des chercheurs. Ces textes sont répartis dans différentes rubriques :

- Penser : apports à la réflexion sur le tutorat à distance ;
- Pratiquer : témoignages de pratiques ;
- Regards sur : à propos de textes parus sur le tutorat ;
- Actualités : analyse de faits pouvant impacter le tutorat à distance ;
- Chroniques : traitement de thèmes connexes au tutorat.

Téléchargement (PDF, 115 pages ; 1,27 Mo)

vendredi 25 juin 2010

L’apprenant sans formateur ? (épisode 2/4) Par Jean Vanderspelden


L’apprenant sans formateur ? (épisode 2/4)
ou la rencontre durable de plus en plus improbable entre l’apprenant et ses formateurs, et donc, vers des responsabilités nouvelles à partager…

La culture de l’écran concurrence celle du livre
L’apprenant et le formateur ont-ils encore un terrain de conciliation autour de l’écrit ?

Cap Digital a organisé, à la Cité des Sciences à Paris en avril 2010, les «Assises nationales de l’éducation et de la formation numériques». Ces rencontres ont eu lieu dans le cadre de la réflexion sur l’optimisation de l’investissement de l’Etat, liée au grand emprunt, dans le secteur du numérique. A cette occasion, S. Tisseron, universitaire à Paris Nanterre, est intervenu en s’appuyant sur son dernier livre co-rédigé avec B. Stiegler «Faut-il interdire les écrans aux enfants ?». Son intervention portait sur l’observation du comportement des enfants et de leur motivation à apprendre, en particulier face aux différents supports interactifs. Ses arguments, repris en partie ci-dessous, nous interrogent directement sur ceux des adultes en formation, aujourd’hui et demain. Ce questionnement est d’autant plus d’actualité que les formations ouvertes s’appuient sur des usages diversifiés, des technologies numériques. Comme le système éducatif, le secteur de la formation continue est confronté à la révolution liée à la présence de l’écran dans de plus en plus d’activités, de lieux et de temps d’apprentissage. La situation est peut-être moins tendue qu’on pourrait l’imaginer. Ces apprenants ont une double culture : celle de l’écran, temps toujours à dominante ludique, et celle du livre, passage parfois obligé, détourné et quelquefois, à consolider.

La maîtrise de la lecture des écrans permet de capter plusieurs informations à la fois où les contraires ne s’excluent pas forcément. La page hypertextuelle peut compléter, ou contredire, une vidéo en streaming qui, elle-même, télescope ou enrichit un mur de commentaires d’un réseau social, dans une troisième fenêtre ; tout cela sur le même écran. L’utilisateur est soumis à ce multi-éclairage et doit en tirer ses propres conclusions. L’écran est une porte d’entrée multiple et immersive, à la fois sur des informations, et aussi, vers de la connaissance. Cela suppose un niveau de traitement adapté des contenus. Le livre, ou plus généralement, l’écrit sur support non numérisé, propose une approche plus douce, avec la lecture séquentielle de page unique. La succession de pages lues donne accès aux réflexions et aux intentions d’un auteur identifié, invitant son lecteur à partager un récit, une croyance, un imaginaire, un fait, un argumentaire, un savoir, un avis, un commentaire, etc… Le lecteur s’identifie, s’approprie, apprend, se projette, rejette, s’interroge, réagit à sa mesure et reconstruit. La culture du livre incite à une pédagogie patiente hypothético-déductive. L’écran stimule plus un apprentissage instantané par essai-erreurs, et ouvre des perspectives novatrices pour la formation intégrant la simulation. Ces cultures articulent deux espaces temps ; les apprenants et les tuteurs s’y répartissent, chacun à leur manière, selon leurs activités et leurs rôles ; apprenant qui plutôt se projette sans repère, sans la présence continue du formateur qui, lui-même, plutôt se protège…

Même si Internet est nettement plus un espace de consultation (lecture et lecture numériquement active avec la capacité virale de «faire suivre»), voire de captation, que de production (écriture), grâce au couple écran-clavier, jamais autant d’écrits n’ont été produits ! Du simple SMS sur l’écran réduit de nos portables, en passant par les commentaires sur les réseaux sociaux, les publications individuelles de billets sur nos blogs ou l’écriture collective d’articles sur les Wikis naissants, mais aussi, et surtout, une nouvelle écriture exponentielle par l’image et par la vidéo ; ici la société de l’(sur)information porte bien son nom. Tous les écrits ne se valent pas, mais constituent un matériau de base qui, de fait, place chaque individu écrivant, dans une relation nouvelle de responsabilité avec les autres. Si j’écris, c’est que j’attends que les autres me lisent, et donc, moi-même, devenant potentiellement lecteur. Ma participation à l’expansion numérique des réseaux est de fait autorégulée par mes pairs. De fait, cette coproduction est un apprentissage qui peut être un passage, une bascule, un complément entre la culture des écritures multimédias et celle de l’écriture papier, dans nos différents espaces de vie.

En termes de communication et d’échange, on relève schématiquement deux espaces. D’abord la sphère personnelle où presque tous les écrits sont permis sur la base des médias ouverts. Ce sont «les écrits des écrans» : SMS, tag, commentaire, message, post, billet, contribution, publication, photo, vidéo, etc... une écriture spontanée, continue et multiforme. Ensuite, dans la sphère professionnelle, la quasi-totalité des écrits de référence reste encore codifiée sur les bases académiques, liées à l’évolution de la langue française et à ses valeurs. Ce sont «les écrits du papier», où le livre a une place particulière comme une sorte «d’écrin des écrits». Paradoxe suprême, ces écrits sont eux-mêmes de plus en plus numérisés : note de service, compte-rendu, courrier, rapport, étude, mémoire, bilan, cahier des charges, article, règlement, loi, etc…

La souplesse et la porosité de la combinatoire des formations de type FOAD (Formation Ouverte et à Distance) génèrent des distances géographique, pédagogique et culturelle. Elles peuvent constituer des opportunités d’équilibre retrouvé entre ces deux espaces. Les maîtrises de ces deux écrits, ceux de l’écran et ceux du livre, sont immanquablement complémentaires. Les écoliers, les collégiens, les lycéens, voire certains étudiants, ont travaillé sur cette double compétence, mais la «bataille» est de plus en plus difficile car déséquilibrée ; l’écran envahissant notre société libérale où les adolescents constituent une cible privilégiée. Quelques années après, confrontés à des réalités incontournables, les adultes, selon leur qualification, en formation ou en production, peuvent bénéficier de temps d’appropriation, de partage et d’enrichissement réciproque de ces deux cultures.

Sur cette question, un terrain de conciliation existe entre l’apprenant et le tuteur. D’un côté, les apprenants confortent la culture écran des formateurs, nécessité pour le développement des activités en entreprise. De l’autre coté, les formateurs renforcent la culture et la maîtrise de l’écrit de l’apprenant, sur la forme et sur le fond. Il s’agit d’une compétence clé pour assurer des responsabilités et assumer pleinement sa place dans notre société : écrire pour affirmer ses identités et pour exister. Cette double reconnaissance participe à la construction en alternance d’environnements ouverts. Dans cette dynamique, pour que l’apprenance, telle que Philippe Carré l’a définie, se développe au profit de tous, y compris des personnes les moins qualifiées, notre société se doit de poursuivre l’installation durable de ces nouvelles organisations dans lesquelles nous sommes tous apprenants, tous écrivants !

Jean Vanderspelden

Déjà paru : Episode 1


l'image dans son contexte, sur la page : www.afrahm.be/?action=onderdeel&onderdeel=35


lundi 21 juin 2010

Le tuteur à distance n'est pas un hot-liner. Par Jacques Rodet


La question de l'industrialisation du tutorat à distance a été d'actualité il y a déjà quelques années. Pour certains, les modèles appliqués dans de grands centre d'appels devaient être une source d'inspiration pour penser les services tutoraux. Est-ce que ceci constitue une réelle solution ? Le tuteur doit-il être un hot-liner ?

Dans les centres d'appels, les personnes en charge de répondre aux demandes des clients se voient confier deux missions principales : répondre efficacement à leurs interlocuteurs, gérer le temps de manière optimale. De ce fait, les concepteurs de ces centres d'appels sont amenés à proposer, à imposer, aux hot-liners des scénarios rigoureux qui sont construits à partir de la méthode du diagnostique. Poser un diagnostique, c'est orienter l'entretien afin que celui-ci prenne la forme d'un entonnoir. Il s'agit à partir d'une situation générale de poser un certain nombre de questions qui permettent au fur et à mesure d'isoler et d'identifier le problème puis de lui apporter une réponse prédéterminée. Cela emprunte également au principe cartésien de la division du problème complexe en un certain nombre de problèmes plus simples à résoudre individuellement. Une fois chacun des problèmes particuliers résolus, le problème complexe est réputé solutionné.

Il est certain qu'un tuteur à distance est fréquemment confronté à la nécessité de comprendre le besoin de soutien de l'apprenant et que la méthode du diagnostique peut lui être utile. Toutefois, ne parier que sur elle et donc l'utiliser de manière exclusive comme il est demandé aux hot-liners traduit, à mon sens, une vision incomplète des fonctions tutorales. En effet, si sur certains plans de support (administratif, technique) le tuteur doit apporter à une question, une réponse unique, ce n'est pas forcément le cas sur le plan cognitif, et de manière bien moindre sur les plans motivationnel et socio-affectif ou encore métacognitif.

Sur le plan cognitif, tout d'abord, l'objectif du tuteur n'est pas d'apporter des réponses ou des solutions toutes faites à l'apprenant mais bien plus d'amener celui-ci à les repérer ou à les élaborer. Si les FAQ ou les glossaires peuvent répondre de manière générique à certaines questions basiques sur le contenu de la formation, la plupart des difficultés des apprenants à aborder de nouvelles notions ou concepts sont liées à leur connaissances préalables, à leurs stratégies d'apprentissage, à leur processus d'apprentissage, à leur capacité à vivre le conflit cognitif, à leur habileté à accommoder les nouveaux apports et leurs représentations précédentes. Sur tous ces points ce sont bien des compétences de pédagogue qui sont nécessaires au tuteur pour aider l'apprenant et non celles d'un hot-liner. Contrairement à ce dernier, le tuteur ne parcourt pas un chemin balisé par un scénario conçu par avance mais va à la rencontre de l'apprenant, là où il se trouve, lui indique les différents chemins possibles pour atteindre son but, respecte le choix d'itinéraire de l'apprenant, l'accompagne et facilite l'avancée de l'apprenant en ayant conscience que ses interventions ne sont utiles que situées dans la zone proximale de développement de celui-ci. Ainsi, le tuteur ne peut adopter une attitude « rationnalisante », forcément mutilante, en réduisant la complexité de l'apprenant à des problèmes particuliers déconnectés les uns des autres, encore moins en allant piocher dans un guide de solutions toutes faites.

L'autre grande différence entre un tuteur et un hot-liner se situe dans la nature même du service délivré en réponse au besoin des individus avec lesquels ils échangent. Le hot-liner intervient de manière ponctuelle auprès d'un client pour résoudre une question ponctuelle d'ordre uniquement cognitif (administratif, commercial, technique). Le tuteur à distance intervient de manière longitudinale et transversale tout au long du parcours de formation de l'apprenant. Dès lors, il est amené à traiter d'éventuelles demandes de l'apprenant qui se situent sur d'autres plans. Intervenir pour soutenir la motivation, pour rompre l'isolement ou faire collaborer des apprenants entre eux, pour encourager l'apprenant à mieux s'évaluer comme apprenant nécessite des compétences non exigées d'un hot-liner. Ce sont celles du tuteur à distance. Mobiliser ses compétences, c'est-à-dire faire appel à ses connaissances, utiliser son savoir-faire et adapter son savoir-être n'est en aucune manière réductible pour le tuteur à distance au seul établissement d'un diagnostique amenant à délivrer une, et une seule, réponse.

Pour toutes ces raisons, je pense que le tuteur n'est pas un hot-liner, qu'il peut adopter dans certains cas les stratégies du hot-liner mais que ses interventions ne se limitent pas à celles-ci. Ce serait donc, à mon sens, une grave erreur de ne penser le tutorat à distance qu'à partir du modèle des centres d'appels à moins de n'avoir pour objectif que ceux visés par ceux-ci qui restent bien éloignés des services tutoraux que tout apprenant à distance est en droit d'attendre de son institution et de ses tuteurs à distance.

Voici l'image dans son contexte, sur la page : www.focusonlinecommunities.com/blogs/Finding_...

jeudi 17 juin 2010

Paroles de tuteur : Jean-François Le Cloarec, tuteur-pair du Master MFEG de Rennes 1


Jean-François Le Cloarec, diplômé du Master MFEG de Rennes 1 en est maintenant un des tuteurs-pairs. Il a volontiers accepté de répondre à mes questions sur les différents aspects de ses rôles auprès de ses pairs, étudiants à distance.

Jacques Rodet : Après avoir été diplômé du Master MFEG de Rennes 1, tu as décidé de t'engager dans le tutorat par les pairs de ce parcours de formation. Peux-tu nous dire qu'elles ont été tes principales motivations pour cela ?

Jean-François Le Cloarec : Ma première motivation était de donner un appui aux apprenants. Le premier risque de la formation à distance est l'abandon lié au sentiment de solitude. Tout apprenant en ligne a un moment été confronté à ce sentiment, cette impression de vide... et toujours au moment où l'on aurait besoin au contraire d'une épaule pour s'appuyer avant de repartir. C'est d'autant plus vrai en formation continue où l'apprenant est déjà confronté aux difficultés liées à la reprise d'études. Ensuite, je vois ce tutorat comme un travail de partenaire. Si l'on peut apporter par son expérience, participer au tutorat est aussi un moyen de rester en contact avec l'évolution des contenus. Chacun apporte à l'autre dans une relation de partenariat.

J.R. :
Quelle est ta définition du tutorat par les pairs ? Comment est-ce que tu le situes par rapport aux autres formes de tutorat ? Quelles sont selon toi les spécificités du tutorat par les pairs ?

J.-F. L.C. :Vaste question, parlons si tu le veux bien de son rôle plutôt que d'une définition forcément réductrice. le tutorat par les pairs tel qu’il est envisagé et pratiqué n’a pas pour objectif de remplacer les Tuteurs-Cours. Les Tuteurs-Pairs ont le rôle de facilitateur sur le plan méthodologique et organisationnel compte tenu de leurs expériences d'anciens apprenants de la formation. Les Tuteurs-Cours sont et restent les référents pour toutes les questions relatives à leurs enseignements. Je pense que le tuteur par les pairs se doit d'être très présent aux moments clés de la formation. En ce qui concerne le master, son intervention peut s'avérer décisive en début de formation bien sur mais aussi dans l'aide au projet de stage et à la préparation de la soutenance. Il peut être amené ponctuellement à intervenir sur les thématiques de cours, comme un médiateur des apprentissages. Cette position n'est pas toujours facile à tenir car on se pique parfois au jeu et il faut faire attention à ne pas se substituer ni aux enseignants, ni aux apprenants. Par rapport aux autres formes de tutorat, je pense que la principale relation réside dans une forme de proximité avec l'apprenant. Cette proximité se traduit par la naissance de relations privilégiées issues d'échange au cours desquels se mêlent conseils professionnels et discussions informelles. Attention à ne pas confondre néanmoins le rôle de tuteur avec celui de « bon copain » ! Mais l'aspect relationnel me paraît décisif pour que s'établisse une relation de confiance. Les apports du tuteur sont un accélérateur dans l'acquisition des savoirs.

J.R. : Quelle a été la genèse du tutorat par les pairs au sein du master MFEG ? Est-ce qu'il est la conséquence d'une démarche institutionnelle ? Au contraire, est-il apparu de manière spontanée ? Quelles ont été les principales étapes de son développement que tu as pu constatées ?

J.-F. L.C. : Il convient de préciser que l'engagement est double puisqu'il s'agit d'une proposition faite à Patrice Mouton, responsable pédagogique du Master. Il s'est montré très ouvert à toutes ces questions et a vu dans le tutorat par les pairs un complément intéressant au dispositif initial. Pour ma part je n'ai pas bénéficié de ce tutorat. Mais au sein de ma promotion nous nous sommes organisés pour assumer cette tâche à notre façon. Nous avons régulièrement travaillé en groupe et les échanges lors des regroupements ont permis d'identifier les compétences partageables entre les uns avec les autres. Le fruit de ces échanges a été la naissance de Skolanet qui s'est par la suite naturellement proposé pour institutionnaliser cette mission au sein du master. Il faut noter que cette initiative a maintenant deux ans et que dans un premier temps elle s’est plutôt concrétisée par un rôle d'accompagnateur de projet de fin d’études. Forte de cette première expérience la mission s'est élargie cette année avec une forte animation des forums et de chats audio en début d'année et un suivi très régulier des apprenants, de la recherche de stage au suivi dans l'avancée du mémoire jusqu'à la recherche d'emploi. Il y a encore des choses à faire pour que le tutorat apporte encore davantage mais il faut aussi savoir limiter son rôle pour ne pas le dénaturer.

J.R. : Comment le tutorat par les pairs est défini et présenté dans le Master MFEG ? Quelles sont les actions que tu mènes envers les nouveaux étudiants pour présenter les services tutoraux dont ils peuvent bénéficier de ta part ?

J.-F. L.C. : Le tutorat par les pairs ainsi que ces champs d’intervention sont présentés dans la charte tutorale du Master qui est distribuée en début de formation. Cela limite les effets de doublon et permet aux différents acteurs de la formation de se focaliser sur leurs missions. En ce qui concerne les actions menées, je participe aux journées de regroupement physique en début d’année au mois de septembre ce qui permet de « briser la glace » ainsi qu’aux premières classes virtuelles. Ces points sont fondamentaux pour la mise en route du dispositif. Pour preuve, cette année une deuxième session a été lancée en janvier 2010 pour laquelle je n’ai pas pu participer. La relation a été plus longue à établir avec les nouveaux venus. Sur le plan pratique, le dispositif est présenté au cours de ces journées puis un échange individualisé systématique est mis en place avec chaque apprenant. J'utilise plusieurs outils pour créer le contact avec les étudiants et leur proposer mon aide. Un espace dédié au tutorat a été mis en place sur la plateforme de formation à distance du master. On y trouve des forums mais ce mode de communication ne convient pas à tous et il est important de le compléter par le mail ou des échanges audio sur Skype ou par téléphone.

J.R. : Peux-tu nous décrire les interventions que tu effectues en direction de tes pairs ? Sur quels plans de support à l'apprentissage (cognitif, socio-affectif, motivationnel, métacognitif) se situent-elles ?

J.-F. L.C. : On peut définir deux types d'interventions. Sur un plan réactif, j'interviens sur des interrogations d'ordre organisationnels ou des problèmes techniques par exemple. Au sein de Skolanet nous sommes trois à intervenir dans ce tutorat. Outre l'atout de la complémentarité, cela facilite aussi notre réactivité et c'est un élément fort apprécié des étudiants je pense. Mais nous intervenons également de façon pro-active, particulièrement au cours du suivi de stage au cours duquel nous essayons de stimuler les étudiants pour qu'ils avancent dans leur projet et lorsque nous n’avons pas était sollicité pendant plusieurs semaines par un apprenant. Sans être un spécialiste des sciences de l'éducation, je situerai mes interventions à la fois sur les quatre plans que tu suggères. Cognitif et métacognitif car mes interventions visent à mettre l'étudiant dans une situation dans laquelle il reste l'acteur principal de ses apprentissages. Mon action ne vise alors qu'à le replacer dans une démarche de réflexion sur ce qu'il est en train d'apprendre. Socio-affectif car c'est un plan que tout formateur en ligne doit intégrer s'il ne veut pas voir ses apprenants déserter « les claviers de l'école ». Motivationnel enfin apportant une dimension « coaching » pour amener les étudiants à réussir les travaux qui leur sont demandés.

J.R. : A contrario, quelles sont les interventions que d'autres tuteurs (tuteur-cours, tuteur-programme) réalisent et que tu ne peux pas réaliser en tant que tuteur-pair ?

J.-F. L.C. : Le tuteur-pair n'a pas un rôle d’enseignant ou de formateur qui doit me semble-t-il rester l'apanage du tuteur-cours. C'est ce dernier qui décide des contenus pertinents et qui détermine le niveau de compétence auquel doit parvenir l’apprenant. Notre rôle n'est pas non plus d'organiser la formation même si nous pouvons faire remonter des demandes ou des attentes au Tuteur-Cours ou au Tuteur-Programme.

J.R. : Alain Baudrit considère que le tutorat par les pairs est efficace dans la mesure où le tuteur-pair peut se prévaloir d'une proximité sociale avec les autres apprenants. Es-tu d'accord avec cela ? Comment, à ton niveau, as-tu ressenti cette proximité ? Quelles sont les interventions tutorales que tu as pu réaliser et qui te semblent plus difficiles à assumer par les autres tuteurs ?

J.-F. L.C. : Le master de Rennes 1 s'appuie sur un fort taux d'inscrits en formation continue. Les tuteurs-pairs de Skolanet ont suivi la formation sous ce statut et exercent aujourd’hui dans des champs assez proches de ceux des apprenants du master. Effectivement, cela crée une certaine proximité sociale qui favorise les relations. Les échanges avec les apprenants reposent sur des problématiques concrètes et répondent à des situations professionnelles réelles. Nous apportons certes notre expérience mais l'objectif est aussi de permettre aux apprenants de capitaliser professionnellement sur leur montée en compétences. Cette dimension sociale est peut-être plus difficile à intégrer pour les autres tuteurs même s'ils ont tout de même rompus aux mécanismes qui animent ce type de public.

J.R. : Alain Baudrit, toujours, estime que le tuteur-pair ne doit pas être professionnalisé afin de conserver justement cette proximité. Pourtant, dans ton cas, tu as été amené, sollicité par le responsable du Master MFEG à t'investir dans des tâches plus académiques telles que l'organisation du suivi des stages en entreprise des étudiants, la guidance de la production de leur mémoire et même dans l'organisation des soutenances. Ne penses-tu pas que cela puisse te faire identifier par les prochaines promotions d'étudiants comme moins proche, plus institutionnel ?

J.-F. L.C. : D’une part, le travail sur le stage de fin d'étude est une situation d'apprentissage par nature différente de ce que les étudiants ont rencontré au cours de la première partie de la formation. Le rôle qui m'a été confié permet de conserver un fil directeur dans la formation. Il y a certes une certaine forme d'institutionnalisation mais elle s'exprime sur une partie de la formation désinstitutionnalisée puisque se déroulant au quotidien selon les règles fixées par l'entreprise et non plus par l'université. D'autre part, l'une des motivations du tuteur-pair réside dans le partenariat qu'il noue avec les étudiants. Suivre les étudiants en stage est un élément de la bilatéralité de ce partenariat. De même, confier aux tuteurs-pairs des tâches plus académiques est de nature à valoriser un travail qu'il n'est pas toujours facile de faire reconnaître comme tel dans d'autres institutions.

J.R. :
A partir du moment où le tutorat par les pairs n'est pas une profession, même s'il peut donner lieu à des indemnités, il semble bien que l'action d'un tuteur-pair ne puisse être mené sur le long terme. Comment alors pérenniser ce service aux étudiants ? As-tu déjà pensé à repérer d'autres étudiants qui pourraient le cas échéant te succéder ? Dans ce cas, penses-tu opportun d'organiser une sorte de passage de relais ?

J.-F. L.C. : Il est aujourd’hui difficile de parler de long terme en ce qui me concerne puisque comme je l’ai indiqué précédemment. Il s’agit dans le cadre de ce diplôme de la première année d’expérimentation du tutorat par les pairs. Pour autant, nous avons conscience qu’il est important de pérenniser le dispositif. L’intégration de nouveaux tuteurs pairs est tout à fait envisagée pour la prochaine rentrée. Nous avons commencé à réfléchir sur plusieurs solutions qui intégreraient des tuteurs pairs au sens strict -comme dans le dispositif actuel mais également d’autres modalités qui pourraient dans l’idéal voir s’investir l’ensemble des apprenants de la promotion actuelle et précédentes. Mais bon, dans le cas présent, je pense que cela fera l’objet d’un prochain entretien !

J.R. : Pour finir cet entretien, peux-tu nous dire quels sont les principaux bénéfices personnels que tu retires de cet engagement auprès de tes pairs ?

J.-F. L.C. : En premier lieu, cette forme de tutorat permet de multiplier les expériences en me forçant à m'adapter constamment aux attentes des uns et des autres, à trouver la réponse la mieux appropriée à leur progression. Je retire une grande richesse de cette expérience sur ce plan. Et j'espère qu'il en est autant pour les apprenants. En second lieu, l'exercice du tutorat sur Rennes 1 permet de rester en contact avec une équipe pédagogique de grande qualité. Nos échanges, comme celui d'aujourd'hui, sont un moyen de continuer à travailler sur les thématiques du e-learning. Ce champ de la formation est en pleine expansion, se développe à grande vitesse et travailler au sein d'une équipe est propice à l'intégration des nouveautés et innovations. Enfin, le taux de satisfaction très important qui ressort du bilan intermédiaire qui a été réalisé il y a quelques semaines est plutôt encourageant et valorisant. Que demander de plus ?

Illustration : Picasso. Deux femmes sur la plage. 1956

lundi 14 juin 2010

Quelques questions autour de l'ingénierie tutorale. Par Jacques Rodet


L'ingénierie tutorale telle que je l'ai définie rassemble les différentes actions qui peuvent être menées lors de la phase de conception d'une formation à distance ou d'une formation hybride pour penser et dimensionner les services tutoraux qui seront offerts aux apprenants.

S'il s'agit d'une démarche qui se veut systématique et systémique, il est bon de préciser d'emblée qu'elle ne vise pas à modéliser les apprenants dans le but de les faire entrer et de les maintenir dans des catégories particulières auxquelles seraient attachés certains types d'interventions tutorales. En effet, si les modèles sont utiles lors de la phase de conception, ils se révèlent souvent peu adaptés à la complexité dont chaque apprenant est porteur. Il y a donc bien deux phases à distinguer en matière de tutorat, celle de l'ingénierie tutorale qui a pour but d'aider les concepteurs à imaginer les services tutoraux et celle des interventions du tuteur auprès de chaque apprenant qui consiste à adapter la délivrance de ces services aux besoins, à la personnalité et aux caractéristiques de chaque apprenant. Ainsi, si lors de la phase de conception, le recours à la modélisation des apprenants est pertinente, elle ne peut servir de seul viatique au tuteur en action lors de la phase de diffusion de la formation.

Ces précisions apportées, il n'en reste pas moins un certain nombre de questions relatives à différents aspects du tutorat à distance telles que la place de l'exercice de son autonomie par l'apprenant au sein de la formation et de son système tutoral ce qui amène à s'interroger également sur la proactivité et la réactivité du tuteur, la place de la rétroaction aux travaux de l'apprenant, la place des interventions du tuteur à l'égard de l'apprenant sur le plan socio-affectif.

L'autonomie et la fonction d'aide du tuteur à l'apprenant
Aider pour rendre autonome n'est-ce pas déjà réduire de manière drastique la liberté de l'apprenant ? N'est-ce pas poser par avance le fait que l'apprenant est en situation inférieure de laquelle il ne pourra s'extraire sans intervention du tuteur qui aura alors, paradoxalement, tendance à accentuer le lien de dépendance à son égard ? L'utilisation de modèles classant les apprenants en différents types, n'est-elle pas de nature à seulement favoriser l'économie du tutorat au dépend des réels besoins ressentis ou non par l'apprenant ?

L'autonomie est souvent présentée comme un pré-requis des apprenants à distance. D'autres auteurs considèrent davantage qu'il s'agit d'un objectif à atteindre qui serait transversal à toute action de formation à distance. En formation à distance, il est indéniable que l'apprenant doive disposer d'une certaine capacité à assumer de manière autonome des tâches qui ne sont plus assurées par l'institution ni même par les tuteurs. Parmi elles, la planification de son apprentissage, le choix de ses stratégies d'apprentissage, l'accès et l'évolution dans l'environnement de la formation, l'aménagement de son espace d'étude... La capacité d'un apprenant à exercer son autonomie est pour une grande part liée à celle de sa pratique de la métacognition, à sa capacité à poser un regard réflexif sur lui-même en tant qu'apprenant. Aider l'apprenant à exercer son autonomie ne consiste donc pas à la réduire par excès d'interventions mais bien davantage à lui indiquer les moyens qui lui permettront de l'exercer. Les apports du tuteur sur ce point gagnent à être personnalisés et ne pas se limiter à la simple application générique des dispositions prévues par l'ingénierie tutorale. Celle-ci, si elle dresse un cadre d'actions pour le tuteur, ne doit pas dispenser le tuteur et l'apprenant de le questionner, de le négocier et de l'adapter aux besoins présents ou non, formulés explicitement ou simplement ressentis, de l'apprenant.

Une des difficultés réside dans le fait qu'un apprenant n'a pas toujours conscience de ses besoins de support. Il me semble, à l'exception de cas critiques qui peuvent amener à l'abandon de l'apprenant, préférable pour le tuteur de ne pas favoriser de manière systématique les actions proactives mais de cultiver au contraire une attitude d'écoute et de restreindre ses actions à la seule Zone de Développement Proximal. C'est-à-dire à n'apporter à l'apprenant que ce qu'il est en mesure de faire sien. C'est en adoptant une telle posture que le tuteur manifestera son respect à l'apprenant et ne cultivera pas la distance qui maintiendrait l'apprenant en situation inférieure et en état de dépendance. Il s'agit alors davantage pour le tuteur de susciter chez l'apprenant une réflexion sur ses besoins de support et de n'intervenir que lorsque ceux-ci sont clairement formulés par l'apprenant.

Mais alors, à quoi bon avoir procédé à une ingénierie tutorale s'il ne s'agit, dans la relation tutorale, que de négocier les interventions tutorales avec chaque apprenant ? N'existe-t-il pas un risque pour certains apprenants de ne jamais manifester leurs besoins et donc de ne jamais bénéficier de réponses adaptées de la part du tuteur ?

Cette contradiction entre le faire et le non faire de la part du tuteur, entre l'ingénierie tutorale et les interventions réelles du tuteur n'est qu'apparente. En effet, comme je l'ai déjà indiqué, il est souhaitable pour un tuteur de ne pas se cantonner à une seule attitude proactive ou réactive mais de les associer. D'autre part, la présentation des services tutoraux conçus lors de l'ingénierie tutorale remplit en elle-même un rôle de support. Le fait de savoir, pour un apprenant, qu'en cas de besoin, il peut bénéficier d'un soutien selon différentes formes concrétisées par la liste des services tutoraux, constitue en lui-même un premier support qui loin de brider l'autonomie de l'apprenant lui permet de l'exercer. C'est à partir des résultats concrets de l'ingénierie tutorale, des livrables produits (charte tutorale, scénarios d'interventions...) que le tuteur pourra penser et dimensionner ses actions envers l'apprenant mais il lui appartiendra toujours de décider de sa conduite en situation, en interaction avec l'apprenant. Ainsi, le tuteur ne peut être réduit à un hot-liner mais intervient bien comme formateur et pédagogue. C'est pourquoi, il est préférable de confier à certaines ressources matérielles (FAQ, messages automatiques, didacticiels...), conçues et réalisées durant la phase d'ingénierie tutorale, les interventions récurrentes de soutien à l'apprentissage.

Il peut être tentant pour une institution de réduire le tutorat à une liste d'interventions proactives ou réactives selon le profil de l'apprenant. En effet, cela permet de les envisager plus facilement par avance et donc d'en estimer le coût. Un des objectifs de l'ingénierie tutorale réside bien dans la détermination du modèle économique du système tutoral. Ainsi, pour tel type d'apprenant dont le profil aura pu être déterminé en début de parcours par une évaluation diagnostique, le tuteur n'aurait plus qu'à suivre une feuille de route spécifiant ses interventions. Si ceci n'est pas invalide, la seule application d'une telle démarche est bien invalide. En effet, elle présuppose que l'apprenant peut être réduit à un type particulier et qu'il n'en dérogera pas tout au long de la formation. Or, si les interventions prévues se révèlent efficaces, un apprenant pourra passer d'un type à l'autre. Il s'agit donc bien pour le tuteur d'être attentif à ces modifications et d'adapter son comportement en conséquence. Ceci n'est possible qu'à partir du moment où le tuteur ne se contente pas d'une vision typée de l'apprenant et que par conséquent il ne limite pas ses interventions à une feuille de route mais qu'il entre en relation « réelle » avec l'apprenant. Cette dernière ne peut être déterminée par avance dans la mesure où elle est le résultat d'interactions entre l'apprenant et le tuteur dont la succession et la variété amènent à des situations dont le nombre exponentiel nécessiterait pour être anticipé, ne serait-ce que partiellement, des coûts de conception bien au-dessus de ceux qui sont affectés généralement à l'ingénierie tutorale ou qui pourraient l'être.

La rétroaction aux travaux de l'apprenant
La rétroaction aux travaux de l'apprenant, que celle-ci se situe dans le cadre d'une évaluation sommative ou formative, est une des tâches importante du tuteur. Elle est de nature à participer à l'apprentissage de l'apprenant (cf. La rétroaction, support d'apprentissage ?). La rétroaction peut être modélisée sur différents axes, celui de sa modalité, de sa portée, de son style. Les choix qui la déterminent relèvent donc bien de l'ingénierie tutorale et à ce titre sont de nature génériques. Certaines institutions choisiront des rétroactions orales, d'autres écrites. Il sera spécifié au tuteur quels plans de support à l'apprentissage la rétroaction doit privilégier. Des indications de style de rédaction peuvent aussi faire l'objet de consignes aux tuteurs. Dès lors, quelle est la capacité de telle rétroaction a rejoindre l'apprenant dans ses besoins propres ? Ne préjuge-t-on pas de besoins non ressentis par l'apprenant ? Ne réduit-on pas l'exercice de son autonomie en lui imposant tel type de rétroaction plutôt que tel autre ?

Ces questions, si elles sont légitimes, me semblent plus théoriques que pratiques. En effet, la rétroaction aux travaux de l'apprenant n'intervient qu'au bout d'un certain temps durant lequel la relation tutorale s'est mise en place puis développée dans un sens ou un autre. Aussi, les prescriptions génériques définissant la rétroaction sont, elles aussi, à réinterroger par le tuteur à la lumière des échanges qu'il a eus avec l'apprenant. Une rétroaction de qualité est d'ailleurs très éloignée d'un corrigé type mais implique pour le tuteur de tenir compte des caractéristiques de l'apprenant. Ce n'est qu'à cette condition qu'elle pourra être personnalisée et donc jouer pleinement son rôle de support à la poursuite de l'apprentissage de l'apprenant. Ainsi, face à un apprenant ayant un exercice avancée de son autonomie, le tuteur interviendra de manière différente que face à un autre apprenant dont la zone proximale de développement est moins étendue. Là où il s'agirait éventuellement de rassurer ce dernier et de connoter affectivement la rétroaction, il en irait différemment pour un apprenant plus autonome, voire recherchant une indépendance certaine vis à vis de son tuteur.

Les interventions du tuteur à l'égard de l'apprenant sur le plan de support socio-affectif
Les interventions tutorales sur le plan socio-affectif sont pour la plupart, difficiles à modéliser et je pense d'ailleurs qu'il n'est pas souhaitable de le faire, sous peine de les rendre artificielles et non efficaces. Elles échappent donc, à mon sens, à l'ingénierie tutorale qui devrait se limiter à en postuler la possibilité. Cela ne revient pas à en sous estimer l'importance mais bien à admettre qu'elles ne sont pas définissables par avance, dans la mesure où elles sont totalement liées aux caractéristiques de chaque apprenant et à la relation tutorale dont le processus se révèle toujours particulier. Il n'y a guère que pour le soutien à un groupe d'apprenants engagé dans des activités collaboratives qu'un certain nombre d'interventions tutorales peuvent être modélisées à partir des apports de la sociologie des groupes restreints.

Le support affectif n'est pas toujours considéré comme important par les concepteurs qui sont attachés à la prééminence du contenu et de manière générale par toutes les personnes qui placent l'acquisition des connaissances au-dessus du processus de construction des connaissances. De nombreux apprenants ont également des pudeurs légitimes à reconnaître leurs besoins de support sur ce plan. De leur côté, les tuteurs sont davantage enclins à mettre en avant ce champ de leurs interventions lorsqu'ils sont amenés à témoigner de leurs pratiques. Il me semble que ce sont les tuteurs qui sont ici « dans le vrai ». En effet, un des premiers objectifs du tutorat n'est-il pas de rompre l'isolement de l'apprenant ? Or l'isolement, qui, certes, peut être cognitif, est d'abord social et affectif.

Les interventions sur le plan socio-affectif doivent néanmoins faire l'objet d'une grande prudence de la part des tuteurs. D'une part, il ne s'agit pas pour eux de jouer le rôle d'un psychologue qu'ils ne sont pas. D'autre part, ils doivent veiller à ne pas maintenir, par ce type d'interventions, l'apprenant dans un rapport de dépendance à leur égard. Peut-être encore plus ici que sur d'autres aspects du tutorat, la double question à laquelle le tuteur doit formuler des réponses actualisées et personnalisées pour chaque apprenant est celle-ci : est-ce que j'en fais assez ? Est-ce que je n'en fais pas trop ?

Illustration : Mosaïque d'Orphée, fin du IIe siècle, trouvée à Vienne (Isère) en 1859
Orphée, ayant ajouté deux cordes supplémentaires à sa lyre charmait les animaux sauvages et parvenait à émouvoir les êtres inanimés.

lundi 7 juin 2010

Parution du n°6 de Tutorales


Edito

Certains d'entre vous se sont peut-être demandés si Tutorales était toujours en vie... Il est vrai que le dernier numéro remonte déjà à décembre 2009. Pourtant ces six mois n'ont pas été inactifs. Plusieurs numéros ont été démarrés mais ce ne sont pas ceux-là que vous pouvez lire aujourd'hui. Le processus de rédaction, surtout pour les auteurs que Tutorales souhaite accueillir ne vas pas toujours de soi et réserve des difficultés que seul le temps peut aplanir. Passage à l'acte, problématique à creuser, hésitations sur le plan et le contenu, blocages institutionnels, temps à aménager avec les autres occupations, voilà quelques uns des obstacles que les auteurs doivent surmonter.
J'aimerais ici insister sur l'un d'entre eux. Il s'agit de la liberté pour les tuteurs de publier. Ce qui va de soi pour un enseignant-chercheur ne l'est pas toujours pour une personne tutrice. De la demande de relecture du texte produit pas sa hiérarchie, qui se réserve le droit d'opposer son veto, à l'interdiction formelle de publier, voire comme cela a été le cas pour un auteur précédent des mesures de rétorsion après publication, écrire pour un tuteur constitue parfois un véritable parcours du combattant. A la vue de cette réalité, le mérite des six auteurs de ce numéro, tutrices et tuteurs en exercice, est à saluer.

Ce numéro est spécial dans la mesure où il accueille pour la première fois, plusieurs auteurs. Il a aussi une histoire particulière. Il s'est concrétisé suite à un appel que j'ai lancé il y a quelques mois dans le tout nouveau groupe de t@d dans Facebook. Très vite une équipe d'une dizaine de personnes s'est formée. L'objectif était de permettre à des tuteurs de témoigner de leurs pratiques. Pour ce faire, une première étape a consisté à inventorier au sein d'un Google Group, les questions auxquelles les participants étaient prêts à répondre. A la fin de ce recensement, il y avait une bonne soixantaine de questions diverses. Les participants ayant répondu à un sondage (Doodle) sur la quantité de questions et la longueur des réponses qu'ils souhaitaient (10 à 15 questions pour des réponses variant de quelques lignes à la demi-page), il est apparu nécessaire de classer la soixantaine de questions par thème puis de les reformuler. La liste s'est alors établie à 12 questions. Elle a été mise en discussion auprès de l'ensemble du groupe t@d sur Facebook (plus de 650 participants) et à travers le Blog de t@d. Suite aux commentaires recueillis, des modifications ont été apportées à ces questions qui ont alors été diffusées aux auteurs. C'est leurs réponses à celles-ci que vous pourrez lire dans ce numéro.


Plusieurs options de présentation étaient possibles. Soit une mise en page synoptique qui aurait permis de mieux comparer les réponses des uns et des autres. Soit une présentation des différentes productions à la suite des unes des autres. C'est cette dernière solution qui a été retenue afin de préserver la cohérence du propos de chaque auteur. Toutefois, afin de faciliter la lecture de ceux qui souhaitent faire un travail de mise en regard, les questions sont numérotées et reprises dans chacun des témoignages.


Une telle production amène assez naturellement aux échanges, entre les auteurs mais aussi avec les lecteurs. C'est pourquoi, l'espace de discussion dans le groupe t@d sur Facebook compte un fil de discussion à propos de ce numéro dans lequel chacun peut échanger avec les auteurs.


Au regard des contributions de ces praticiens la question qui sert de titre à un court billet de ma part « Qui fait le tuteur à distance ? » pourra paraître bien spécieuse. Il me semble pourtant intéressant d'interroger l'identité du tuteur de trois points de vue différents, celui de l'institution, de l'apprenant et du tuteur lui-même à travers trois processus, celui du pouvoir, du vouloir et du savoir.


Comme à l'accoutumé, ce numéro comprend aussi un entretien avec un chercheur. Cette fois, c'est avec Jean Loisier que j'ai eu le plaisir de m'entretenir à propos de son remarquable mémoire produit pour le compte du REFAD, institution québécoise, intitulé « Mémoire sur l'encadrement des étudiant(e)s dans les formations en ligne offertes aux différents niveaux d'enseignement. ». Je vous recommande très fort sa lecture et bien évidemment aussi celle de son entretien à considérer soit comme une entrée en matière, soit comme un approfondissement de certains aspects de sa pensée sur l'encadrement.


Bonne lecture et au plaisir de futurs échanges !

Jacques Rodet


Au sommaire

  • Témoignages de tuteurs à distance sur leurs pratiques : Besma Ben Salah ; Badreddine Boussafsaf ; Lucile Diemert ; Virginie Lopez ; Jean-Maurice Razanakolona ; Jean-François Savard
  • Entretien avec Jean Loisier
  • Qui fait le tuteur à distance ? Jacques Rodet
  • Nouveautés sur le tutorat à distance
Télécharger le n°6 de Tutorales


jeudi 3 juin 2010

Publications et veille de t@d au mois de mai 2010


BILLETS DU BLOG

L’apprenant sans formateur ? (épisode 1) Par Jean Vanderspelden
Jean Vanderspelden a imaginé pour le Blog de t@d, une série de billets portant sur la thématique de l'apprenance et des nouvelles relations illustrées entre apprenant-appreneur, dont le titre générique est : "Apprenant sans formateur?".

CIUEN 2010, sélection de communications sur l'accompagnement
L'édition 2010 du CIUEN se déroule les 14, 15 et 16 juin au Palais de la Musique et des Congrès de Strasbourg.

Co-construction des services tutoraux en formation à distance. Par Jacques Rodet
A travers l'expérience du Master MFEG à Rennes 1, sera présentée une démarche originale de co-construction des services tutoraux avec les apprenants.

5e journées du eLearning
Les 5e journées du eLearning qui se tiendront les 24 et 25 juin à Lyon ont pour thème "Au-delà des plate-formes : la e-pédagogie

Autour de l'accompagnement et du tutorat. Des communications prometteuses à l'AIPU 2010
Communications où les questions d'accompagnement et de tutorat sont directement ou plus indirectement traitées.

Colloque du Girefad au sein de l'ACFAS
Pour une formation à distance de qualité. La conception de dispositifs en collaboration en formation à distance : Aspects théoriques et défis pratiques

Usages des rétroactions des tuteurs à distance. Par Jacques Rodet
Le diaporama qui m'a servi de support lors de l'intervention que j'ai effectué dans le cadre de l'Atelier lunaire du programme FAD de la Téluq

L'encadrement-programme aux études supérieures en formation à distance à la Téluq
L'encadrement-programme est une des modalités d'encadrement des étudiants.

Soutenir et évaluer, deux rôles en tension pour le tuteur à distance. Par Jacques Rodet
Notes que j'ai utilisées pour lancer le débat du colloque du REFAD sur le double rôle que jouent les intervenant(e)s (tuteurs, professeurs, enseignants, chargés d’encadrement, etc.) qui encadrent les étudiants et qui doivent, par ailleurs, évaluer leurs travaux notés et examens.

Le REFAD, un acteur majeur de la formation à distance au Québec
Quelques informations qui permettront de se faire une idée plus précise des missions que le REFAD s'est donné depuis 22 ans déjà.

Séjour au Québec de Jacques Rodet... Où il sera question de tutorat à distance
Présentation des communications de J. Rodet lors du colloque du REFAD, de l'Atelier lunaire du programme FAD de la Téluq et du congrès de l'ACFAS

Tutorat dans Moodle
Communication à MoodleMoot 2010 : "Utilisation particulière de Moodle pour le tutorat dans un grand dispositif de formation en ligne : cas du campus numérique" ENVAM (M. Diaz & H. Podvin).


RESULTATS DE VEILLE

Ressources des colloques | form@HETICE
A voir en particulier Mariane Frenay : Dynamique motivationnelle et pratiques pédagogiques Atelier n° 2 : Julie Henry et Casto Grana, Motivation et formation à distance

PairsAnciens-PairsNouveaux: L'EDUCATION PAR LES PAIRS
Les pairs désignent des individus ayant des caractéristiques communes, telles que le sexe, l'âge, l'ethnie, les centres d'intérêt, les loisirs, les aspirations...

Marie-France Cyr, tutrice, conférencière au congrès de l’Association professionnelle des paramédics du Québec
Sa communication, prévue le 2 juin, portera sur le thème « La communication empathique entre le paramédic et le malade ».

Colloque « Technologies et Motivation, des théories aux pratiques » | form@HETICE

Vidéo > TIC et cybermentorat, une combinaison gagnante...

Revue sticef : Modéliser l’organisation du tutorat pour assister la description de scénarios d’encadrement
Le travail présenté dans cet article s’intéresse à la conception d’activités d’encadrement d’apprenants dans le cadre de Formation en Ligne (FEL).

Revue sticef : Des interactions sociales en formation universitaire à distance, Une approche microsociologique exploratoire et inférentielle
Dans cet article, nous nous intéressons à l’organisation des interactions sociales dans un dispositif de formation universitaire en ligne.

Le mentorat en début de carrière : retombées sur la charge professorale et conditions de mise en œuvre d’un programme en milieu universitaire
Cette synthèse d’écrits a été menée dans le but de faire état des retombées du mentorat en milieu éducatif, plus précisément, le mentorat destiné aux enseignants universitaires en début de carrière et des conditions de mise en œuvre d’un programme.

Edilivre > Styles d’apprentissage et rendement académique dans les formations en ligne. Violaine Page Lamarche
Existe-t-il un style d’apprentissage dominant, chez des apprenants adulte, en situation d’apprentissage, dans un contexte spécifique de formation en ligne ? Quelles correspondances observer entre le style d’apprentissage et le rendement académique dans ce contexte spécifique de formation ?

Médiathèque de l’Université Paris Descartes - Journée du 18 mai 2010 : "Université fabrique du futur"
Enseignement et apprentissage : De l’enseignement au tutorat en ligne

PairsAnciens-PairsNouveaux: LES ENFANTS APPRENNENT MIEUX GRACE AUX PAIRS
Il semble que les enfants apprennent mieux d’autres enfants que des adultes et que ce serait particulièrement le cas lorsqu’il y a une différence d’âge entre ces derniers. Lilian Katz a remarqué qu’ils peuvent adapter leur vocabulaire à l’âge de leur interlocuteur.

Écriture réflexive et réflexion critique dans l’exercice du compte rendu

Vif succès du colloque du REFAD 2010
L'article d'Yvan Duperré pour "le sans papier"

Dima HANNA. Les nouveaux métiers du e-learning: Le tutorat - Le blog de seraphin ALAVA
Billet de Séraphin Alava

NB-Sondage auprès des tuteurs en français hiver 2010 Survey
Sondage soumis aux tuteurs pour améliorer la qualité du tutorat par les pairs

[FGA - Montérégie] Stratégie gagnante
Le suivi individualisé est une fonction importante dans la tâche des enseignants en formation générale des adultes. Qu’on l’appelle suivi pédagogique, tutorat, suivi individuel, etc., ces rencontres sont des moments privilégiés pour échanger avec nos élèves sur leur cheminement scolaire et parfois sur leur situation personnelle.