dimanche 20 décembre 2015

Très bonnes fêtes !





Quelques mots sur l'activité du Blog :

Le rythme de publication est en moyenne d'un billet tous les 11 jours.

Le cap des 400 000 vues a été dépassé en décembre. La moyenne mensuelle actuelle de vues se situe autour des 9000. Les origines des visites sont les suivantes : lien direct sur un post (30% des visites), URL du Blog (25% des visites), Google (35% des visites), autres sites (10%).

Les visiteurs sont géographiquement dispersés et il est à noter une augmentation significative des visiteurs américains (la langue française ne se porte donc pas si mal même aux USA ;-)



Je vous souhaite d'excellentes fêtes de fin d'année
et vous remercie pour votre fidélité.


lundi 30 novembre 2015

Matrice d'opérationnalité d'une intervention tutorale

Dans un de mes cours d'ingénierie tutorale au sein d'un master formant des futurs chefs de projet digital learning, j’interroge régulièrement les étudiants sur les interventions tutorales qu'ils ont reçues et celles qu’ils auraient appréciées recevoir.

Cette activité de haut niveau cognitif permet aux étudiants de s’auto-évaluer sur leur compréhension des grandes notions du tutorat à distance (fonctions, plans de supports, modalité, outils…), les amène à revenir sur leurs vécus d’apprenants, leur permet de dresser un panorama des interventions tutorales dispensées dans leur master et de vérifier si la charte tutorale est respectée, d’identifier des pistes d’amélioration du dispositif tutoral. Elle donne lieu chaque année à un rapport transmis aux responsables du master. (cf. La co-construction avec les apprenants à distance des services tutoraux. In Le tutorat de pairs dans l'enseignement supérieur, ouvrage collectif sous la direction de Cathia Papi, L'Harmattan, Savoirs et formation. 2013).

C’est plus précisément sur les interventions tutorales que les étudiants souhaiteraient avoir que je veux m’attarder dans ce billet. Elles peuvent être classées en plusieurs catégories de propositions d’interventions tutorales : périphériques, redondantes, idéales, opérationnelles.

Les interventions tutorales périphériques

Les interventions tutorales périphériques concernent non pas le dispositif de formation mais des services voisins à celui-ci. Les plus fréquentes concernent, et cela traduit les préoccupations légitimes des étudiants sur leur avenir, le soutien à la détermination de leur projet professionnel, la rédaction de CV, la détermination d’une stratégie de personal branding, l’aide à l’accès à la communauté des professionnels et des entreprises du digital learning, l'appartenance à une association d'anciens, la recommandation, etc.

Certes dans un dispositif de formation professionnelle, l’institution ne peut pas se désintéresser du devenir professionnel de ses étudiants. Pour autant, cela doit-elle l’inciter à prévoir ce type d’interventions tutorales voire de coaching et même de mentorat au sein de la maquette de ses diplômes ? Possède-t-elle les personnes ressources compétentes pour cela ? Avec quel budget ces interventions seront-elles financées alors qu’elles ne concernent pas directement la formation, ni la mission première de l’institution universitaire ? Doit-elle nouer des partenariats avec Pôle Emploi ? Des associations ? Des cabinets de recrutement ?

Il ressort que ce type de soutien est rarement disponible et que lorsqu’un tuteur le procure, c’est en dehors de ses missions définies dans la charte tutorale et uniquement pour de rares étudiants.

Les interventions tutorales redondantes

Les interventions tutorales redondantes correspondent à la reformulation de services tutoraux déjà prévus dans le dispositif. Cela indique que ces derniers n’ont pas été repérés par les étudiants, peut-être tout simplement parce qu’ils n’ont pas été délivrés de manière proactive.

Cela pose inévitablement la question de la publicité du dispositif tutoral, de sa compréhension par les étudiants mais également celle de l’engagement des étudiants dans la relation tutorale. Certes demander de l’aide n’est pas toujours facile mais toutes les interventions tutorales ne peuvent pas être proactives sous peine d’être ressenties comme trop nombreuses et intrusives, voire invasives, par les étudiants les plus aptes à exercer leur autonomie.

Les interventions tutorales idéales

Les interventions tutorales idéales sont centrées sur les besoins ressentis par les étudiants. Le point de départ est donc intéressant et à ne pas négliger par le concepteur. Pourtant, elles sont souvent peu opérationnelles car elles demandent la mobilisation de moyens dont ne dispose pas l’institution. Ainsi, si un dispositif tutoral doit essayer de répondre aux besoins des apprenants, il est rare qu’il puisse apporter des réponses à tous du fait même de contraintes politiques, budgétaires, techniques ou même par manque de personnes ressources compétentes.

Depuis longtemps, je préconise que la détermination d’un dispositif tutoral non idéal mais adapté doit passer par un inventaire des représentations des besoins d’aide des apprenants tant du point de vue de l’institution que de l’équipe pédagogique et des apprenants eux-mêmes. Puis, il est nécessaire de prioriser ces besoins, par étude de criticité par exemple (cf. Propositions pour l'ingénierie tutorale). Dès lors, il faut bien admettre que la seule expression d’un besoin par un apprenant ne peut déboucher sur la mise en œuvre d’une intervention tutorale. 

Afin de donner une idée du travail des étudiants dans cette activité, voici une proposition d'intervention tutorale idéale rédigée par Christophe M-A Bechellaoui. 

Objectifs de l’intervention tutorale
  • Intégrer les spécificités du projet de l’apprenant et ainsi personnaliser l’accueil, le parcours…
  • Organiser les activités au regard de ce projet
  • Accompagner à l’intégration et à la « mise en rythme » de l’apprenant
  • Convenir d’échanges sur une période d’intégration courte afin de vérifier l’adéquation projet d’entreprise/déroulement de la formation.
Type de Tutorat
  • Intervention de type parcours/organisationnelle (tuteur programme)
  • Intervention de type pédagogique/cours (tuteurs cours)
Plans de support à l’apprentissage
  • Sur un plan métacognitif : accompagner le projet d’entreprise, l’équipe et moi-même, en initiant un travail de formalisation, de retraitement, de formulation des objectifs à atteindre au sein de chaque module et des stratégies liées afin de les atteindre individuellement et collectivement. Inscrire l’équipe dans un projet plus global, celui des personnes qui participent au master (créer de la relation individus/objectifs)
  • Sur le plan motivationnel : faire adhérer au parcours en proposant une prise en compte des particularités du projet et ainsi personnaliser par « l’intention » le parcours
  • Sur le plan organisationnel : impliquer par la co-construction d’un « contrat d’objectifs » individuel et collectif.
  • Sur le plan pédagogique : orienter le contenu au regard des objectifs fixés, orienter les productions individuelles et collectives en cohérence avec le projet d’équipe et d‘entreprise.

Modalités et déroulement de l’intervention
  • Activité PROACTIVE :

Avant le démarrage :
  • Faire formaliser par écrit les objectifs individuels par chaque membre de l’équipe : envoi au tuteur parcours par E-mail (activité asynchrone, limite quantitative d’une page maximum)
  • RDV online : séance de travail équipe sur le projet individuel et collectif. Le tuteur-parcours opte pour une posture « en retrait » ou de « modérateur ». L’objectif sur 1h étant de faire ressortir les objectifs communs et de les mettre en relation avec les objectifs spécifiques de chaque module. Une « RoadMap » d’objectifs clés est formalisée (Activité synchrone)
  • Activité en back-office : le tuteur-parcours communique le résultat à chaque enseignant concerné.
Après démarrage :
  • Tuteurs-cours (pédagogique) : le responsable du module envoi un mail court de présentation et de synthèse du module qui intègre les objectifs fixés (activité asynchrone).
  • Tuteurs-cours (pédagogique) : ils proposent des activités en cohérence avec les objectifs, notamment ceux liés à la dynamique d’équipe. Ils favorisent les échanges avec les autres membres du Master (activité synchrone/asynchrone).
Outils
  • E-mail
  • Classe virtuelle.
Durée
  • 2h pour le tuteur-programme
  • 30 mn pour le tuteur-cours
Coût
  • Pas réaliste sur une promotion de plus de 10 personnes.

Les interventions tutorales opérationnelles

Si les interventions tutorales opérationnelles ne sont pas les plus nombreuses, dans la mesure où les étudiants, lors cette activité, sont encore en cours de formation, il est possible d’en proposer une modélisation simple. Une intervention tutorale opérationnelle est a minima une intervention qui tient compte de quatre facteurs de contraintes : politique, budgétaire, technique, compétences des tuteurs. Il est possible de se les représenter graphiquement de la sorte.

Matrice d'opérationnalité d'une intervention tutorale 



Pour chaque facteur de contrainte, une valeur sur une échelle de 1 à 4 peut être utilisée. Par exemple : 
  • 1 : non contraignant : l'intervention tutorale peut être menée sans modification de l'existant pour le facteur considéré 
  • 2 : peu contraignant : l'intervention tutorale peut être menée suite à un ajustement de l'existant pour le facteur considéré 
  • 3 contraignant : l'intervention tutorale ne peut être menée qu'à la suite de modifications substantielles de l'existant pour le facteur considéré 
  • 4 : très contraignant : l'intervention tutorale ne peut être menée qu'à la suite de modifications profondes de l'existant pour le facteur considéré 
Le facteur "Politique" est relatif à la stratégie tutorale de l'institution qui est habituellement décrite, mais pas toujours malheureusement, dans la charte tutorale.

Le facteur "Budget" peut être déterminé en calculant le coût de l'intervention tutorale. (cf. ma conférence "Les coûts du tutorat" vidéo)

Le facteur "Compétences" est relatif à l'expérience des tuteurs dont dispose l'institution. (cf. les billets du Blog de t@d traitant des compétences des tuteurs)

Le facteur "Technique" est relatif aux outils nécessaires de mobiliser pour réaliser l'intervention tutorale

Dans l’exemple ci-dessous, où l’aire des contraintes est en rouge, il y a peu de chance que l’intervention tutorale soit mise en œuvre car si elle est non contraignante d’un point de vue technique et peu contraignante politiquement, elle est très contraignante budgétairement et contraignante au niveau des compétences à posséder par les tuteurs pour la mener.

Exemple de la représentation graphique d'une intervention tutorale non opérationnelle



Les interventions réalistes sont celles dont l’aire des contraintes est la moins grande et dont la forme est celle d’un losange parfait ou peu déformé.


Limites de la matrice 

Cette matrice peut bien évidemment être enrichie par d'autres facteurs tels que la disponibilité temporelle, les espaces à mobiliser, les actions de conduite de changement à mener, etc.  Dès lors ce n'est plus forcément la forme du losange qui serait adaptée mais plutôt celle d'un tableau.

De même, chaque facteur pourrait faire l'objet d'un détail plus grand. Par exemple sur le plan politique, il serait intéressant de déterminer l'instance décisionnaire : le responsable du diplôme, le département, le conseil d'administration de la composante, celui de l'université.

Par ailleurs, la matrice ne permet pas en elle-même de rendre opérationnelle une intervention tutorale mais simplement d'en identifer l'opérationnalité possible. Pour être opérationnelle, une intervention tutorale doit être décrite sous forme de storyboard (cf. ScénoFORM)

Au final, le plus important est de prendre conscience que la formulation d'un besoin de soutien ne détermine pas automatiquement une intervention tutorale, que la décision de la mettre en place ne peut pas être prise uniquement à partir de sa plus-value pédagogique, que le tutorat comme bien d'autres dimensions du digital learning est fortement dimensionné par d'autres enjeux que la seule pédagogie et la réussite des étudiants. 

vendredi 27 novembre 2015

APP4MOOC au service de la proactivité du tutorat

Il est bien établi que les interventions tutorales proactives sont essentielles pour faire vivre la relation pédagogique au sein d’un digital learning, même si elles ne sont pas suffisantes et doivent être complétées par des interventions tutorales réactives. Par ailleurs, les outils supportant ces interventions gagnent toujours à être sélectionnés en fonction des préférences d’usage des apprenants. Aujourd’hui, la mobilité est incontournable et dans certains pays le réseau téléphonique est bien plus stable que les connexions internet. De ce fait, le smartphone ou la tablette deviennent des outils pertinents pour rejoindre les apprenants.


APP4MOOC est un service de développement d’applications mobiles dédiées à toutes les formations à distance, dont les MOOC. L’expérimentant dans le DU Cofordi de l’université de Rennes 1 où j’interviens comme tuteur, je le trouve particulièrement facile d’utilisation et adapté à certaines de mes interventions tutorales telles celles destinées à manifester des signes de présence, à prodiguer des encouragements, à rappeler des dates d’échéances, etc. Certes, l’essentiel de mes interventions tutorales est réalisé sur le LMS mais l’utilisation de l’application permet de compléter utilement celles-ci. 





Nous entretenons tous un rapport affectif avec notre smartphone, que celui-ci reste professionnel ou soit plus passionné et addictif, et le fait d’utiliser une application traduit pour le moins un choix et une préférence. Télécharger une application dédiée à son parcours de formation manifeste un signe d’appartenance qui influe, à son tour, sur son rapport socio-affectif avec le dispositif de formation si essentiel à la persévérance. Cela revient à accepter que la formation entre dans son quotidien, ce qui ne peut qu’être bénéfique pédagogiquement.

Lors du salon iLearning Forum, j’aurai l’occasion de m’exprimer plus complètement sur mon retour d’expérience, le mardi 26 janvier 2016 à 15h sur le stand de la société elearning touch’ qui distribue APP4MOOC.

Plaquette de présentation de APP4MOOC

samedi 21 novembre 2015

Parution du volume 11 des Fragments du Blog de t@d


Bonjour,

J’ai le plaisir de vous annoncer la parution du 11e volume des Fragments du Blog de t@d. 

Cette revue collationne régulièrement les billets les plus significatifs parus sur ce blog. 

Cette livraison de 82 pages comprend 23 billets parus entre novembre 2013 et novembre 2015 classés en six rubriques : tuteurs, pratiques tutorales, temps et espace, tutorat et mooc, ingénierie tutorale, varia.


Ce volume est également consultable sur Calaméo 


Bonne lecture,
Jacques Rodet

jeudi 12 novembre 2015

Identifier son temps d’apprentissage dans un digital learning

Le temps de formation représente souvent une difficulté pour les apprenants à distance. En effet, il convient pour eux d’identifier des plages horaires qui doivent s’insérer dans le reste de leurs occupations. Les apprenants les moins à l’aise avec la planification ont souvent l’impression de manquer de temps.

Dans la figure ci-dessous, nous proposons une répartition des temps types d’une semaine, soit 168 heures dans laquelle nous avons inséré un temps de formation de 10 heures. Bien évidemment, cette figure n’est qu’un exemple et il appartient à chaque apprenant d’identifier ses propres temps. Certains temps peuvent simultanément relever de deux catégories, par exemple lorsque l'apprenant profite de ses déplacements pour réaliser une de ses activités de formation.



La difficulté de la gestion de son temps est aussi relative au manque de savoir-faire dans la quantification des activités à réaliser durant la formation. Les apprenants à distance ont souvent du mal à trouver le temps nécessaire à la réalisation des activités proposées. Par contre, ils ne sont que très rarement en capacité de quantifier le temps dont ils auraient besoin…

Pourtant, la plupart du temps, dans un parcours de formation, les temps moyens nécessaires à chacune des activités sont indiqués. Ceux-ci pouvant varier d’un individu à un autre, la première question que l’apprenant devrait se poser est la suivante : lorsque je fais une activité demandant 30 mn, combien de temps j’y passe ? Il peut alors facilement identifier son CTP (Coefficient Temporel Personnel) : 0,75% du temps indiqué, 100%, 150%, 200%...

Connaître le temps dont on a besoin est la première chose à faire par l’apprenant mais la seconde est de toute aussi grande importance : noter dans son agenda les temps réservés à sa formation : pas seulement les rendez-vous synchrones mais également les temps de consultation des ressources, les temps de réalisation des travaux individuels ou collaboratifs. Pour ces derniers, il est prudent de compter 15 à 20% en plus pour la coordination avec ses pairs.

Il est nécessaire pour l’apprenant d’être réaliste plutôt que volontariste dans sa planification : prévoir des temps trop courts l’amènera immanquablement au constat qu’il manque de temps. A contrario, prévoir trop de temps peut se révéler intenable. Il est difficile de quantifier juste du premier coup, aussi l’apprenant ne devrait pas négliger de faire un comparatif entre le prévu et le réel, cela l’amènera progressivement à devenir un meilleur planificateur.

Le temps est certainement une contrainte mais ce n’est que lorsque l'on se fixe des contraintes, que l'on avance. Le temps est une ressource et comme telle doit être gérée.

Lorsque l’apprenant a plusieurs cours ou modules en parallèle, il lui faut planifier des temps pour chacune des activités de ces cours ou modules. En effet, consacrer tout son temps à un seul d’entre eux, l’amènerait à accumuler du retard sur les autres. Pour autant, il est préférable de ne pas réaliser plusieurs activités de cours différents en une même séance de travail à moins d’être très à l'aise dans le zapping ;-).

Le secret de la planification, c’est de la réaliser en amont mais surtout de prévoir des marges de manœuvre.

Prenons le cas d’une personne qui a prévu de consacrer à sa formation 3 fois 1 heure et 1 fois 2 heures par semaine. Il est alors prudent qu’elle planifie 2 séances de 1 heure supplémentaires. Cette marge de manœuvre lui permettra de faire face aux aléas (impossibilité de réaliser une séance prévue, coup de fatigue, temps nécessaire à une activité supérieur à ce qui était prévu, etc.) sans que les objectifs de la semaine ne soient remis en cause.

Planifier demande de faire des choix ayant parfois des conséquences sur son entourage professionnel, familial, amical. Il est donc nécessaire d’en parler avec lui.

Ne pas planifier, c'est souvent programmer son échec. Ne pas accumuler de retard est la meilleure assurance pour compléter sa formation.

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A lire également
Le manque de temps des apprenants à distance
Les apprenants en prise avec le temps et l'espace de leur formation

lundi 12 octobre 2015

Articulation des livrables de l'ingénierie tutorale avec ceux d'un digital learning



Le système tutoral est composé des résultats de trois actions principales : i) l'analyse des besoins de soutien des apprenants, ii) la priorisation des réponses tutorales permettant d'y répondre, iii) la détermination des profils de tuteurs. Ces actions peuvent être entreprises dès que le projet est défini dans ses grandes lignes, soit la production du pitch. L'analyse des besoins de soutien des apprenants constitue une sous partie de l'analyse des publics. La priorisation des réponses tutorales ainsi que les profils de tuteurs viennent enrichir le synopsis. Le système tutoral doit être validé avant la phase de conception.

Le scénario tutoral est composé des résultats de trois actions : i) la conception des intervention tutorales et leur positionnement sur le scénario détaillé, ii) la quantification des interventions tutorales, iii) la rédaction de la charte tutorale. Ces actions, pour être entreprises nécessitent la production préalable du scénario général pour les interventions tutorales structurelles et du scénario détaillé pour les interventions tutorales conjoncturelles. Une fois ces interventions déterminées et en s'appuyant sur la description des profils de tuteurs réalisée lors du livrable "système tutoral", il est nécessaire de rédiger la charte tutorale qui correspond aux droits et devoirs des tuteurs et des apprenants les uns envers les autres. Le scénario tutoral doit être validé avant la phase de production car il est lui-même prescripteur de production de ressources (guide de tuteur, FAQ, didacticiels, fiche méthodologiques, etc.)

Le plan de diffusion est composé des résultats de trois actions : i) la formation des tuteurs et l'initiation d'une communauté de pratiques des tuteurs, ii) la mise au point des outils de suivi des interventions tutorales, iii) la détermination du modèle économique du dispositif tutoral. La formation des tuteurs peut intervenir dès que ceux-ci ont été identifiés mais ne doit pas être trop éloignée du démarrage de la diffusion du dispositif. La communauté de pratiques est à initier en même temps mais poursuit son activité tout au long et même après la diffusion du dispositif. La mise au point des outils de suivi des interventions tutorales doit être effectuée de préférence en amont de la formation des tuteurs afin qu'ils en constituent un des éléments. Le modèle économique du dispositif tutoral, qui peut être déjà cerné après le livrable "système tutoral" et précisé après le livrable "scénario tutoral" doit être finalisé avant la diffusion du dispositif. Le plan de diffusion doit forcément précédé la diffusion puisqu'il en conditionne le bon déroulement.

L'audit du tutorat est un des éléments du plan d'évaluation. Il est organisé autour de trois étapes : i) le recueil de données, convoquées ou provoquées par entretien et questionnaires, ii) l'analyse des données et la présentation des résultats, iii) la formulation de préconisations d'amélioration du dispositif tutoral. L'audit du tutorat peut être réalisé tout au long de la diffusion, en particulier par la collation des rapports d'animation mais est généralement effectué à la fin de celle-ci, conjointement au plan d'évaluation.

A lire également
De la nécessité de l'ingénierie tutorale
Les différents types d'ingénierie tutorale



lundi 28 septembre 2015

Processus d'une intervention tutorale réactive

Les interventions tutorales réactives constituent une bonne part du travail des tuteurs à distance. Afin d'être menées de manière efficace, le tuteur doit procéder à un diagnostic et effectuer des choix. Le schéma ci-dessous propose une modélisation de ce processus.






Réception de la demande de soutien
Le tuteur doit procéder à un premier diagnostic. Comprend-il réellement la demande de l'apprenant ? Le style du message, l'infratexte et les précédentes interactions qu'il a eues avec cet apprenant lui permettent-il d'avoir une représentation non équivoque de l'état d'esprit de l'apprenant ? S'il ne peut répondre avec certitude à ces questions, il est nécessaire qu'il sollicite l'apprenant, en lui posant des questions plutôt ouvertes, pour obtenir les compléments d'information qui lui permettront de situer précisément la difficulté rencontrée afin d'élaborer ensuite sa réponse.

La formulation du diagnostic
Le tuteur doit formuler son diagnostic, en particulier en identifiant si le problème est relatif à une défaillance du dispositif ou à une difficulté de l'apprenant. Pour déterminer la nature du ou des plans de soutien concernés (cognitif, socio-affectif, motivationnel, métacognitif), le tuteur s'appuie sur le repérage des mots clés et des phrases les plus significatives du message de l'apprenant. 

Interventions en cas de défaillance du dispositif
Il revient au tuteur d'alerter les services en charge de la maintenance du dispositif afin qu'ils puissent solutionner le problème et en parallèle d'informer les apprenants de la prise en charge du problème en indiquant, si possible, une échéance de retour à la normale. Cette intervention doit être la plus rapide possible.

Diagnostic en cas de difficulté de l'apprenant
Lorsqu'un apprenant éprouve une difficulté, il est important que le tuteur identifie s'il s'agit d'une difficulté spécifique à l'apprenant ou si elle concerne, ou peut concerner, également d'autres apprenants. En effet, selon le cas, il n'utilisera pas les mêmes outils de communication pour apporter sa réponse.

Intervention auprès d'un apprenant
Le tuteur utilise un outil de communication privée pour formuler sa réponse. Il fait le choix d'une intervention synchrone ou asynchrone. Il structure sa réponse afin de répondre aux différents points relevés lors du diagnostic en commençant par le plus important. Lorsqu'il n'est pas certain de son interprétation, malgré les informations complémentaires obtenues auprès de l'apprenant, il utilise le conditionnel pour formuler ses hypothèses. Il engage l'apprenant à réagir à ses propos et rappelle sa disponibilité.

Intervention auprès du groupe d'apprenants
Le tuteur estimant que la difficulté rencontrée par l'apprenant qui l'a sollicité peut également l'être par d'autres apprenants utilise un outil de communication collective pour transmettre sa réponse. Il est à noter que l'intervention tutorale est réactive pour l'apprenant qui l'a sollicitée et proactive pour les autres apprenants. Il reformule le propos initial de l'apprenant afin de l'anonymiser et lui conférer une dimension plus générale. Il formule une réponse la plus factuelle et précise possible et peut également renvoyer aux ressources du cours ou à d'autres, externes. 


A lire également 

Les différents types d'interventions tutorales
La consigne et le conseil : de leurs usages par le tuteur à distance
Inciter les apprenants à trouver leurs propres réponses
Aide toi, le tuteur t'aidera

lundi 21 septembre 2015

Typologie d'interventions tutorales

Cette typologie distingue d'une part, les modalités proactive (le tuteur intervient sans avoir été sollicité par l'apprenant) et réactive (le tuteur intervient en réponse à une sollicitation d'un apprenant), et d'autre part, le caractère synchrone (en temps réel) ou asynchrone (en temps différé) de la communication. Cette typologie n'est donc pas basée comme d'autres (cf. MIT de Quintin) sur les fonctions des tuteurs et les plans de support à l'apprentissage mais sur la nature de la communication et l'identification de l'émetteur initial.





itRA
Les interventions tutorales réactives asynchrones sont les plus courantes. Elles ne peuvent pas être réellement conçues à l'avance mais le tuteur s'appuie sur son expérience pour y répondre. A cet égard, il peut constituer des modèles de messages qu'il réutilise d'une session à l'autre.


itRS
Les interventions tutorales réactives synchrones supposent une prise de rendez-vous entre le tuteur et les apprenants. Réalisées fréquemment en classe virtuelle, elles permettent de procéder à des remédiations et des commentaires aux productions des apprenants.

itRQI
Les interventions tutorales réactives quasi instantanées sont réalisées dans un délai inférieur à une heure après la sollicitation de l'apprenant. Elles peuvent être réalisées en mode synchrone ou asynchrone selon la disponibilité de l'apprenant. Sur les avantages et inconvénients des itRQI cf. ce billet.

itPA
Les interventions tutorales proactives asynchrones peuvent être préparées à l'avance. Les points intermédiaires permettant de faire le point sur ce qui a été fait et sur ce qui reste à faire par les apprenants réalisées par mail ou forum en sont des bons exemples. 


itPS 
Les interventions tutorales proactives synchrones peuvent être facilement conçues et planifiées à l'avance à partir de cas type. Elles sont réalisées par téléphone, ou communication audio-visuelle. Elles concernent fréquemment les relances d'apprenants inactifs. Elles permettent de rompre l'isolement de l'apprenant et de lutter contre l'abandon. 


Lors de la conception d'un digital learning, le choix des différents types d'interventions tutorales permet d'évaluer plus facilement la charge de travail d'un tuteur. C'est par la combinaison harmonieuse de ces types d'interventions qu'il est possible d'atteindre plus facilement les buts assignés au tutorat dont le premier est de permettre à l'apprenant d'atteindre ses objectifs d'apprentissage et le deuxième d'exercer son autonomie d'apprenant.


Sur le même sujet
Les interventions tutorales structurelles et conjoncturelles

Sur la conception des services tutoraux
Les billets traitant de l'ingénierie tutorale

Sur l'autonomie de l'apprenant à distance
Les billets traitant de l'exercice de son autonomie par l'apprenant

mercredi 16 septembre 2015

Les tuteurs à distance ont-ils un droit à la déconnexion ?

Dans son récent rapport remis à la ministre du travail, Bruno Mettling, directeur général adjoint d’Orange, chargé des ressources humaines, propose d’instaurer « un droit à la déconnexion professionnelle qui doit se généraliser par négociation d’entreprise ».

Un tel droit serait-il imaginable pour les tuteurs à distance ?

Notons tout d’abord, que la disponibilité des tuteurs est largement attendue par leurs apprenants. Etre disponible, c’est être en mesure d’engager l’échange au moment où l’apprenant en a besoin. Dans l’enquête que j’avais menée auprès d’étudiants sur les ITRQI (interventions tutorales réactives quasi instantanées – réponse dans un délai inférieure à 1 heure), la totalité des répondants avaient exprimés leur désir d’en bénéficier.

Par ailleurs, plusieurs sondages que j’ai réalisés auprès de tuteurs font apparaître que l’immense majorité d’entre eux travaillent les jours fériés. En week-end et parfois en vacances, je me suis vu répondre à des apprenants et je ne suis pas le seul à faire de même.

Pourtant, la disponibilité ne peut être continue. Elle est d’ailleurs cadrée, parfois, dans les chartes tutorales qui lient les tuteurs à leurs institutions et aux apprenants. Négocier leur disponibilité et convenir des modalités d’échanges avec les apprenants est souvent, lors de la première prise de contact, une des actions que mènent les tuteurs à distance.

L’expression « droit à la déconnexion par négociation » est largement paradoxale et préfigure peut-être la confusion qui risque d'être entretenue lors des débats sur la prochaine réforme du droit du travail. Un droit ne se négocie pas, il s’applique et se respecte. C’est le contrat qui se négocie. Le contrat pédagogique de la relation tutorale est effectivement négociable. Ainsi, la déconnexion des tuteurs à distance est parfois négociée, mais le plus souvent, fait l’objet d’entente implicite. Tel apprenant envoyant une demande de soutien à son tuteur en pleine nuit ne s’attend pas à recevoir une réponse immédiate.

Au final, il apparaît que le droit à la déconnexion soit peu adapté à l’activité tutorale, que les tuteurs à distance, travailleurs numériques, soient peu enclins à déconnecter au regard de l'idée qu'ils se font de la délivrance des services de soutien aux apprenants, que la négociation ramenée au savoir-être des apprenants et des tuteurs n’ait aucunement besoin de l’établissement d’un droit, que la relation pédagogique, pour s’épanouir, ait davantage besoin de confiance construite par contrat et par interactions successives plutôt que par l’affirmation d’un droit.

mercredi 2 septembre 2015

Quel rôle pour les tuteurs dans la conception des digital learning ?


La production d’un digital learning impose un travail d’équipe et une dissociation forte entre la phase de conception et celle de la diffusion. L’équipe de concepteurs regroupe des experts de contenus, des pédagogues, des ergonomes, des médiatiseurs et des techniciens. Durant la diffusion, ces acteurs cèdent la place aux tuteurs qui sont chargés d’encadrer, d’accompagner, de soutenir mais aussi fréquemment d’évaluer les apprenants.

Concepteurs et tuteurs n’ont généralement pas l’occasion d’échanger car ils n’interviennent pas en même temps et que l’équipe de conception n’existe souvent plus lorsque la formation est diffusée. Ceci présente des inconvénients qui sont révélés par différentes situations : le tuteur obligé de multiplier des interventions de remédiations car le contenu n’est pas réellement autoportant ; le scénario tutoral n’ayant pas été, ou insuffisamment, décrit, les interventions tutorales diffèrent, parfois fortement, d’un tuteur à un autre ; les activités d’apprentissage se révélant plus coûteuses en temps pour les apprenants que ce qui avait été devisé par les concepteurs, les tuteurs voient se multiplier les sollicitations de report d’échéance, etc.

Dans un article récent, Martine Chomienne, Bruno Poellhuber et Nicole Racette (1) ont traité de la coopération entre tuteurs et concepteurs. Si leur étude est contextualisée au Cegep à distance qui est « la division dédiée à la formation à distance du collège de Rosemont qui lui-même est un établissement post secondaire du ministère de l’Éducation du Québec », il est possible d’en dégager quelques principes généralisables :

  • Lorsque les tuteurs sont aussi des experts de contenu, ils devraient être prioritairement recrutés dans l’équipe de conception.
  • Les tuteurs devraient être sollicités par les concepteurs durant la phase de conception, en particulier pour donner leurs avis sur les activités d’apprentissage et d’évaluation.
  • Les cours conçus ou révisés devraient être présentés aux tuteurs par les concepteurs tant au niveau que du contenu et des activités que sur l’approche pédagogique et les interventions tutorales attendues.
  • Des espaces d’échanges, en présence et à distance, entre concepteurs et tuteurs devraient être aménagés durant la diffusion de la formation, en particulier lors de la première session de la formation, afin que les tuteurs puissent faire remonter les difficultés des apprenants sur tel ou tel aspect du contenu ou du matériel pédagogique et suggérer des modifications.


(1) Coopération entre l’équipe de conception et l’équipe d’encadrement au cégep à distance. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01185049/document


lundi 31 août 2015

Profils de tuteurs à distance

Les tâches de support à l'apprentissage auprès des apprenants à distance sont nombreuses et variées. Il en résulte qu'il est difficile de trouver des personnes tutrices en capacité de les assumer toutes. Dès lors, il est utile de définir différents profils de tuteurs avec des périmètres d'intervention bien identifiés.

Voici quelques exemples de profils


Tuteur programme : ce rôle est souvent investi par le responsable de la formation. Il assure le bon fonctionnement du dispositif de formation en exerçant le rôle de médiateur entre les tuteurs, les apprenants, les services administratifs et techniques.

Tuteur cours : ce rôle est le plus souvent investi par le formateur pouvant également être le concepteur du cours. Au plan pédagogique, il est un facilitateur, un accompagnateur, un médiateur, un régulateur, un évaluateur et un stimulateur.

Tuteur projet : Il a pour but d’accompagner les apprenants durant leurs stages pratiques et de faciliter la communication avec les tuteurs en entreprise. Il intervient aussi dans la définition de son projet professionnel par l’apprenant.

Tuteur technique : Il a pour but de gérer les questions techniques courantes (accès aux LMS et aux classes virtuelles, dysfonctionnement des outils, conseils pour le paramétrage des postes de travail des apprenants.

Tuteur administratif : Il a pour but d’informer et accompagner administrative-ment les apprenants : obtention des logins et mots de passe, des certificats d'assiduité, traitement dossier financier.

Tuteur pair : Il a pour but de faciliter l’entraide entre les apprenants. Il est investi par d’anciens apprenants et/ou entre les apprenants d’une même formation.

La multiplication des profils de tuteurs a deux conséquences principales. D'une part, il est nécessaire de prévoir les modalités de coordination entres les tuteurs. D'autre part, il est nécessaire de donner aux apprenants une réelle visibilité sur ces différents profils afin qu'ils soient en capacité de les solliciter à bon escient. Il est également possible d'organiser l'accès des apprenants à ces différents profils à travers un guichet unique pouvant être tenu par une personne dédiée ou l'un des profils. Dans ce dernier cas, le guichet unique est tenu le plus souvent par le tuteur programme ou un tuteur pair.

Aller plus loin

Inconvénients de la figure du "tuteur-orchestre"
http://blogdetad.blogspot.fr/2009/09/inconvenients-de-la-figure-du-tuteur.html

A propos des modèles d'exercice des fonctions tutorales de Viviane Glikman. Pour des systèmes tutoraux diversifiés
http://blogdetad.blogspot.fr/2008/04/propos-des-modles-dexercice-des.html

Entretien avec Patrice Mouton, le tutorat au sein du MFEG de Rennes 1
http://blogdetad.blogspot.fr/2009/09/entretien-avec-patrice-mouton-le.html

Retour sur un dispositif tutoral à l'université par Sylvain Vacaresse
http://blogdetad.blogspot.fr/2013/12/retour-sur-un-dispositif-tutoral.html



jeudi 27 août 2015

Conseil et formation sur le tutorat à distance


J'ai le plaisir de vous présenter les dispositifs de conseil et de formation dédiés à la réussite de l'accompagnement des apprenants à distance de vos projets digital learning.



L'ingénierie tutorale est une prestation de conception de votre dispositif tutoral structurée autour de la production de livrables : i) le système tutoral qui permet d'identifier le périmètre du soutien aux apprenants et les profils de tuteurs nécessaires ; ii) le scénario tutoral qui consiste à positionner, concevoir et quantifier les interventions tutorales ; iii) le plan de diffusion destiné à préparer les tuteurs à leurs interventions et à identifier le modèle économique de votre dispositif.

APT' est une prestation d'audit de vos services tutoraux existants afin de les rendre plus performants. Ceux-ci sont examinés à partir d'un recueil de données (documents, questionnaires, entretiens) qui sont ensuite analysées afin d'aboutir à des préconisations tant sur l'organisation de votre dispositif tutoral, que sur les interventions tutorales et le développement des compétences des tuteurs.

mROI et e-ROI est une prestation de conseil destinée à quantifier la contribution du tutorat au ROI de vos formations en ligne. Le recours à différentes équations permettent d'identifier précisément les coûts et les gains relatifs au tutorat. 

tut' est une offre de formation sur le tutorat à distance et son ingénierie en classe virtuelle. Structurée en 6 parcours comportant chacun 4 classes virtuelles, elle autorise une grande personnalisation des parcours correspondant à vos besoins.

ConceptTUT, QTUT et FormTUT sont des formation-action. Leur but est de vous rendre autonome dans la conception, la quantification et la réalisation des interventions tutorales. Elles vous permettent de développer vos compétences tout en travaillant sur vos dispositifs digital learning.


jeudi 28 mai 2015

Enquête de besoins sur un outil de gestion de la relation tutorale

ENQUETE CLOSE





t@d, le réseau du tutorat à distance, travaille actuellement à la définition d’un outil au service des tuteurs qui leur permettra de conserver la mémoire de l'intégralité de leur suivi tutoral. 

Mutualisé, ce service de gestion qualitative des interventions tutorales leur permettra de personnaliser l'accompagnement de leurs apprenants. 

Afin de mieux préciser le cahier des charges de cet outil, nous vous remercions de consacrer 10 mn de votre temps pour répondre à ce questionnaire.

Bien cordialement,
Jacques Rodet et Salifou Dene, Anne-Cécile France, Jean-Paul Moiraud, Stéphanie Noirpoudre, Michel Vandriessche

mercredi 27 mai 2015

Le tutorat pour améliorer le ROI du e-learning et des moocs

Le tutorat des apprenants à distance est fréquemment négligé par les initiateurs de dispositifs car il est jugé complexe, inutile dès lors que les apprenants sont jugés autonomes, mais avant tout, onéreux. Il est vrai que le modèle économique du tutorat, peu de coûts fixes mais de nombreux coûts variables, est le reflet inverse de celui du e-learning et que ceci ne facilite donc pas sa prise en compte. Pour autant, l’économie escomptée, par l’absence de support à l’apprentissage ou son transfert sur le seul tutorat entre pairs (gratuit), est rarement au rendez-vous. En effet, l’examen des différentes formes historiques de la mise à distance de la formation, des cours par correspondance aux moocs en passant par la FAD, l’EAO, la FOAD et le e-learning, permet de dégager un invariant : sans accompagnement des apprenants, le taux d’abandon dépasse 90% des inscrits. (1)  Cette donnée est essentielle à prendre en compte lors du calcul du retour sur investissement (ROI) d’un dispositif. Les conséquences d’un abandon, même si elles ne se cantonnent pas à l’aspect financier, sont aussi sonnantes et trébuchantes. L’amélioration du ROI par le tutorat nécessite donc d’identifier précisément les coûts de l’accompagnement des apprenants mais également les gains que celui-ci procure.





Dans la suite de ce billet, après avoir identifié les coûts du tutorat, je traite plus particulièrement du calcul des bénéfices du tutorat dans le e-learning puis dans les moocs.

LES COUTS FIXES DU TUTORAT A DISTANCE

Les coûts fixes du tutorat à distance peuvent être répartis en plusieurs catégories. Tout d’abord, l’ensemble des frais relatifs à l’ingénierie tutorale dont l’objectif est la définition, la conception et la préparation à la diffusion des services tutoraux. Grâce aux différentes actions de l’ingénierie tutorale, les interventions tutorales peuvent être précisément quantifiées et le modèle économique du système tutoral défini. Autre poste de coûts fixes, les outils de communication mis à la disposition des tuteurs et des apprenants pour supporter leurs interactions. Afin de réduire le tutorat humain à sa réelle plus-value, il est utile de produire différentes ressources de support à l’apprentissage (guide de formation, FAQ, didacticiels, etc.). Les coûts de conception et de production de ces ressources sont imputables au tutorat. Enfin, la formation des futurs tuteurs, si nécessaire tant sur le plan technologique que sur celui de la posture professionnelle, constitue la dernière catégorie des coûts fixes du tutorat.

LES COUTS VARIABLES DU TUTORAT A DISTANCE

Les coûts variables du tutorat sont essentiellement constitués par les rémunérations des tuteurs. Que celles-ci soient calculées par apprenant ou par forfait pour un groupe d’apprenants, leur montant dépend du nombre d’apprenants inscrits, de la durée des interventions tutorales prévues et du niveau de productivité des tuteurs. A noter que cette dernière peut être largement améliorée par une formation adéquate des tuteurs et la mise à leur disposition de ressources facilitant la réalisation de leurs interventions auprès des apprenants (scénario, modèle de messages, fiches méthodologiques, outil de suivi de la relation tutorale, etc.). Dans le cas où les tuteurs sont multiples, il est nécessaire de les manager afin de coordonner leurs actions. Le salaire du responsable de l’équipe tutorale entre dans une deuxième catégorie des frais variables. Enfin, la gestion globale du dispositif tutoral, son évaluation et ses améliorations, la communication des résultats obtenus entraînent d’autres frais variables.

Pour aller plus loin sur la question des coûts du tutorat à distance




COMMENT AMELIORER LE ROI DE SON E-LEARNING PAR LE TUTORAT ?











eROI est un dispositif dédié à l’amélioration du rendement de vos e-learning par le tutorat. (2)


eROI est structuré en plusieurs étapes : définition des objectifs du tutorat, détermination des indicateurs d’atteinte des objectifs, calcul du coût du tutorat, calcul des bénéfices du tutorat, calcul de l’impact du tutorat sur le ROI.

Les objectifs peuvent être les suivants : baisse du nombre d’abandons, fidélisation des clients, vente de services tutoraux, argument concurrentiel pour gagner des parts de marché.

Les indicateurs d’atteinte des objectifs permettent de qualifier précisément le niveau de réussite du dispositif tutoral : pourcentage d’apprenants terminant leur parcours, nombre de clients achetant une nouvelle formation, chiffre d’affaires relatif à la dispense des services tutoraux, nombre de nouveaux clients recrutés par les campagnes marketing présentant les services tutoraux.

Le calcul du coût du tutorat est réalisé lors de l’ingénierie tutorale et réévalué en fin de formation à partir de l’équation suivante : 

Coût réel du tutorat pour un apprenant =
coûts du tutorat / % atteinte des objectifs du tutorat / nombre d’apprenants

Le calcul des bénéfices du tutorat peut être calculé par comparaison du nombre d’apprenants terminant leur formation entre un groupe d’apprenants tutorés et un autre groupe non tutoré. 

Bénéfices = nombre d’abandons groupe non tutoré – nombre d’abandons groupe tutoré
X prix de la formation/apprenant 
– coûts du tutorat

D’autres formules sont possibles, notamment pour tenir compte, non plus seulement de la persévérance dans la formation, mais également de l’atteinte des objectifs de formation évaluable à partir du modèle de Kirkpatrick.


COMMENT AMELIORER LE ROI DE SON MOOC PAR LE TUTORAT ?



mROI est un dispositif dédié à l’amélioration du rendement de vos moocs par le tutorat. (2)

Parler de ROI pour les moocs alors que le modèle économique de ces dispositifs n’est pas encore clairement établi peut paraître bien aventureux. Toutefois, les postes de recettes sont identifiables. D’une part, les services tutoraux peuvent être vendus, d’autre part, les certifications sont vendues.Dès lors, l’enjeu est d’augmenter le nombre de certifiés. Le tutorat y contribue directement car il permet aux participants de persévérer et d’aller au bout de leur parcours.

Le bénéfice du tutorat dans les moocs est calculé à partir de la formule suivante : 

Bénéfices = CA de la vente de services tutoraux
+ [(nombre d’apprenants tutorés certifiés 
– nombre d’apprenants non tutorés certifiés) 
X prix de la certification] – coûts du tutorat



Alors que le tutorat est envisagé comme un poste de coûts, il est primordial d’en identifier également les recettes et d’en calculer le bénéfice. Le tutorat est décisif, non seulement pour assurer la réussite des apprenants, mais également pour améliorer la rentabilité financière des dispositifs de formation. 

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Notes

(1) A titre d’exemple seuls 5,8% des inscrits aux moocs d’edX obtiennent une certification.

(2) Les dispositifs eROI et mROI sont proposés de manière exclusive par la société JRODET Conseil

jeudi 14 mai 2015

ZPD : espace tutoral

La ZPD (zone proximale de développement) est une notion qui nous vient des travaux de Lev Vygotski. Elle couvre l’espace qui sépare ce qu’un individu peut apprendre seul et ce qu’il peut apprendre avec l’aide d’une ou d’autres personnes. Elle est le lieu de l’étayage permettant ensuite l’exercice de son autonomie par l’apprenant.

C’est donc une notion particulièrement féconde pour penser et situer le tutorat à distance et il serait souhaitable que les personnes investissant des fonctions tutorales y soient sensibilisées.

Pour débuter, ce billet, ancien mais toujours pertinent, de Jacques Lecomte pour Sciences Humaines.


mercredi 6 mai 2015

Les différents types d’ingénierie tutorale

Depuis une douzaine d'années, j'ai progressivement conceptualisé et formalisé l'ingénierie tutorale. Ce travail de réflexion est le résultat de plusieurs processus conjoints. D'une part, mes interventions de conseil auprès d'organisations porteuses de projet e-learning, d'autre part, mes enseignements universitaires à l'UVSQ, Rennes 1 et Toulouse Le Mirail (388 étudiants formés à la conception des services tutoraux) et mes actions de formation relatives à tel ou tel autre aspect de l'ingénierie tutorale (plus d'un millier d'apprenants). A cela s'ajoute, les différents séminaires, colloques et conférences réalisés sur le sujet, les échanges avec de nombreux collègues, l'activité au sein de t@d. Plusieurs dates constituent des témoins de l'évolution de ma pensée : en 2003 la typologie des plans de supports à l'apprentissage, en 2010 mes propositions pour l'ingénierie tutorale, en 2012 le croisement des fonctions tutorales et des plans de supports à l'apprentissage, en 2014 la formalisation du processus d'audit de la performance tutorale et les méthodes de priorisation des besoins de soutien des apprenants. En 2015, les indices de gravité et de probabilité pour une étude de criticité appliquée à l'ingénierie tutorale.

Selon ma définition de 2010, « l’ingénierie tutorale rassemble les différentes actions qui peuvent être menées lors de la phase de conception d'une formation à distance ou d'une formation hybride pour penser et dimensionner les services tutoraux qui seront offerts aux apprenants ». (1) Ces actions sont rassemblées en trois livrables, i) le système tutoral qui vise à identifier les besoins de soutien des apprenants, à les prioriser et à définir les profils de tuteurs, ii) le scénario tutoral qui permet de concevoir, de positionner et de quantifier les interventions tutorales, de préciser les outils qui seront utilisés pour les réaliser et de rédiger la charte tutorale, iii) le plan de diffusion qui organise la formation des tuteurs et de leurs communautés de pratiques, l’élaboration d’outils de suivi de la relation tutorale et la définition du modèle économique du dispositif tutoral.

Si dès 2010, la notion d’évaluation n’est pas absente de mon propos (« L'ingénierie tutorale relève plus d'un processus - pro au sens de « vers l'avant » et de cessus aller, marcher - d'actions à enclencher pour améliorer la qualité du tutorat et produire un système tutoral opérationnel ») c’est au fil de mes interventions de terrain que le recours à l’audit s’est davantage formalisé et traduit par un dispositif d’Audit de la Performance Tutorale, APT’. (2)

Le travail sur le terrain m'indique que si la conceptualisation est précieuse, la mise en oeuvre de l'ensemble des actions d'ingénierie tutorale n'est pas systématique. En effet, en fonction du contexte, du temps disponible, des budgets consentis, ce ne sont que quelques actions préconisées par l'ingénierie tutorale qui sont effectivement réalisées. Par exemple, un dispositif de formation existant dont les résultats en terme de persévérance des apprenants sont faibles nécessite tout d'abord la réalisation d'un audit de performance tutorale suivi d'actions de ré-ingénierie du scénario tutoral puis d'une mise à niveau des compétences des tuteurs. Autre exemple, la diffusion prochaine d'une formation en ligne amène son institution à se poser (tardivement), la question de la constitution d'une équipe de tuteurs. Ainsi ce sont les actions de formation et de constitution d'une communauté de pratiques des tuteurs qui sont le point de départ de l'ingénierie tutorale. Dernier exemple, une organisation souhaite calculer le ROI de sa pratique tutorale. Cela passe par une identification précise des coûts du tutorat et celle des gains que sa mise en oeuvre a permis de réaliser. C'est le modèle économique qui est ainsi le point de départ d'une action plus large d'ingénierie tutorale.

Il apparaît donc que l'approche théorique que j'ai proposée en 2010 (ci-dessous l'ingénierie tutorale déductive) n'est pas le seul type d'ingénierie tutorale mis en place sur le terrain. D'un point de vue conceptuel mais également opérationnel, il est nécessaire d'adjoindre à la production des livrables la réalisation d'un audit permettant d'engager l'institution dans un processus d'évaluation et d'amélioration continu de son dispositif tutoral.

Afin d'y voir un peu plus clair, je propose ci-dessous une typologie des différentes ingénieries tutorales en fonction de la production effective ou non des trois livrables et de l’audit de performance tutorale.




























Les 4 types de niveau basique







Les 4 types de niveau intermédiaire









Le type de niveau élevé






















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(1) Rodet, Jacques (2010)  Propositions pour l'ingénierie tutorale 

(2) APT' Audit de Performance Tutorale
http://www.jrodet.fr/APT/index.htm